Dans les usages pratiques du numérique, nous utilisons des terminaux (smartphone, tablettes et ordinateurs) connectés à des serveurs, eux-mêmes interconnectés, cf. article Souveraineté numérique ? (1/2)

La première mesure est de savoir à qui se connecte votre terminal, quand vous naviguez sur internet ou utilisez une application (logiciel) au moyen d'un logiciel spécialisé qui identifie les connexions entrantes et sortantes de votre machine, et vous permet de les contrôler. Sur MacOS, je recommande LittleSnitch, mais il existe des équivalents pour les autres systèmes d'exploitation :
https://alternativeto.net/software/little-snitch/

Une fois cette étape mise en place vous êtes plus informés de ce qui se passe en arrière plan, à votre insu, vous pouvez progressivement reprendre le contrôle de vos connexions en empêchant les flux de données non souhaités.

Cela peut être l'occasion d'un ménage au niveau d'applications qui se connectent sans nécessité évidente pour nous mais pour récupérer des données de la part de leurs éditeurs. Il existe aujourd'hui un grand choix de programmes performants dans le monde du logiciel libre, ou de l'open source, où le code est public et développé par une communauté et mis à disposition gratuitement.

Une dimension de la souveraineté numérique est d'utiliser de préférence des logiciels open source car ils ne sont pas liés aux intérêts des multinationales du secteurs, notamment en matière de commerce des données. Les solutions open source, basées sur le partage et l'évolution possède des atouts de qualité et le gros avantage de réduire les coûts. Cela ne veut pas forcément dire gratuit puisqu'on peut soutenir financièrement les développeurs ou contribuer à l'évolution du logiciel si on a des talents de programmeur.

Nous l'avons vu dans l'article précédent (vous avez probablement vu quelques épisodes de la série Dopamine,  https://www.arte.tv/fr/videos/RC-017841/dopamine/ les contenus sont sélectionnés par des algorithmes et alimentent des business models plutôt opaques, et parfois trompeurs. Ce qui revient à se poser les questions suivantes : sur telle appli ou tel site que j'utilise souvent :
1) quelle est la fonction de l'algorithme ?
2) Quel est modèle économique de ce service ?

Puisque les algorithmes sélectionnent souvent les contenus, ils interviennent de fait dans la détermination de nos opinions, de nos croyances. Rester conscient qu'il existe un biais algorithmique dans l'information recherchée nous permet de relativiser l'information présentée. Pourtant sur des sources en apparence neutres et impartiales, certaines informations sont censurées. Ce qui prouve une forme de partialité.

En pensant faire des recherches neutres, notre perception peut être influencée, des centres d'intérêt nouveaux favorisés et notre jugement influencé, ce qui impose un questionnement sur le thème du libre arbitre. Laisser sa naïveté au vestiaire et s'armer de vigilance, de bons sens et d'esprit critique.

Ainsi la souveraineté numérique consiste aussi à exercer un esprit critique permettant de relativiser certaines informations en les replaçant dans un contexte plus large, et en défocalisant des sujets récurrents pour garder un esprit ouvert.

Le paradoxe est que cette évolution de l'usage demande des temps supplémentaires. Pour ne pas que le numérique prenne le pas sur nos vies, mais reste un outil, il convient de favoriser un usage plus raisonné du numérique, c'est à dire un gardant les finalités de chaque outil en vue, tout en nous fixant des objectifs clairs quand à l'usage de l'outil pour que ce ne soit pas une simple habitude pour passer le temps.

L'information circule en flux multiples, cela est utile pour comparer, jauger, croiser des points de vue. Pour parvenir à faire un tri cohérent de nos sources, il est utile d'observer les lignes éditoriales, de les comprendre. Cela permet de s'informer d'une manière plus consciente, en intégrant les biais d'information.  Cela autorise à ne pas tout prendre à la lettre, et encore une fois cela impose d'exercer notre esprit critique.

Une activité amusante et utile consiste à rechercher les patterns ou structure de l'information : quelle est la grille invisible qui structure mon media favori ? Quelle trame se dégage au fil des épisodes, des itérations ? Le canevas informationnel permet aussi d'apporter une forme de relativité puisqu'il nous livre la structure qui catégorise et hiérarchise l'information.

A l'ère de l'éditorialisme il convient bien sûr de distinguer les opinions (qui n'engagent que leurs auteurs) des informations (qu'il nous appartient de vérifier, creuser, élargir, contextualiser...) car dans le cas contraire nous pourrions adopter des idées émises par des influenceurs d'opinion, que nous n'avons forgées avec notre libre arbitre.

Vous êtes probablement en train de vous questionner sur les implications pour l'autonomie intellectuelle, avec raison, car comment développer notre autonomie intellectuelle à une époque où nous sommes soumis à des influences, parfois difficiles à identifier. Je reviendrai plus en détail sur la notion d'autonomie intellectuelle dans un prochain article.