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142 - LA PROGRESSION MONDIALE DE L’ÉNERGIE GÉOTHERMIQUE

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Publication du Earth Policy Institute
Mise à jour du Plan B
16 juin 2011

LA PROGRESSION MONDIALE
DE L’ÉNERGIE GÉOTHERMIQUE

texte original:
http://www.earth-policy.org/plan_b_updates/2011/update98

J. Matthew Roney, traduit par Frédéric Jouffroy et Marc Zischka

En 1904, le Prince Italien Piero Ginori Conti fut le premier à utiliser l’énergie géothermique pour l’éclairage (pour faire marcher 5 ampoules, soyons précis). Aujourd’hui, plus de 100 ans après cette première expérience, 24 pays utilisent l’énergie géothermique. La capacité de production installée dans le monde, de 10 900 mégawatts, permet de couvrir, avec une électricité d’origine renouvelable, l’équivalent des besoins de plus de 6 millions de foyers américains. La progression de l’énergie géothermique n’a été que de 3% par an lors de la dernière décennie, mais elle devrait considérablement accélérer, une capacité supplémentaire de production de près de 9 000 mégawatts étant prévue d’ici 2015. Près de 350 projets sont en développement dans des dizaines de pays.

électricité géothermique


La source d’énergie utilisée pour produire de l’électricité d’origine géothermique est le formidable flux de chaleur provenant du manteau et du coeur de la terre, ou de la décomposition d’éléments radio-actifs dans l’écorce terrestre. La technique utilisée consiste à forer un puits pour atteindre des roches perméables et poreuses contenant des réservoirs d’eau chaude ou de vapeur; cette eau est ensuite ramenée en surface pour faire tourner une turbine et générer de l’électricité. Dans le passé, une eau d’une température d’au moins 150°C était nécessaire, que l’on trouvait en abondance aussi bien dans les pays de la Ceinture de Feu du Pacifique (dont le Chili, l’Indonésie, le Japon et les Etats-Unis) que dans la Région de la Vallée du Grand Rift en Afrique. Cependant, des avancées technologiques récentes rendent désormais possible la génération d’électricité à partir d’une eau à température plus basse, ce qui permet à l’Allemagne, à la Hongrie et à d’autres pays de commencer à exploiter leur potentiel d’énergie géothermique.

Bien que les projets géothermiques demandent des investissements initiaux élevés, en particulier pour l’exploration, le forage et la construction des centrales, les coûts d’exploitation sont généralement faibles, par la suppression des dépenses en carburant. En conséquence, les centrales géothermiques sont souvent sur leur durée de vie, plus rentables que les centrales nucléaires ou celles utilisant des combustibles fossiles. Un autre avantage des centrales géothermiques est qu’elles peuvent produire de façon continue, ne demandant pas de sources d’énergie de substitution non renouvelables.

Avec 3 100 mégawatts installés dans 9 états de l’Ouest du pays, les Etats-Unis dominent largement en terme de capacité de production (voir les données). La moitié de cette capacité provient de “The Geysers”, un ensemble de 17 centrales au Nord de la Californie, qui constitue le plus grand complexe géothermique du monde.

Au cours des 20 dernières années, la capacité de production géothermique des Etats-Unis n’a augmenté que de 330 mégawatts. Mais grâce à de récents changements dans la politique d’incitations du gouvernement, dont la garantie de prêts, des crédits d’impôts à la production, et des subventions, l’industrie géothermique des Etats-Unis est actuellement en plein essor. Plus de 120 projets validés représentant près de 1 400 mégawatts sont en développement dans 14 états, la plupart dans les états de l’Ouest. Ils concernent les lieux traditionnels de production, comme la Californie ou le Nevada, mais certains sont aussi en train de naitre à l’Est en Louisiane, au Mississippi, et au Texas. Plus de 750 mégawatts de capacité de production devraient être raccordés au réseau d’ici 2015.

Même si les Etats-Unis sont les premiers en terme de capacité de production, l’énergie géothermique n’est nulle part aussi présente qu’en Islande. Avec une capacité installée de 575 mégawatts, chiffre qui pourrait doubler d’ici 2015, l’énergie géothermique fournit un quart de l’électricité du pays. La compagnie d’électricité possédée par l’état est même en train d’envisager de construire un câble sous-marin pour exporter de l’électricité d’origine géothermique et hydraulienne vers l’Ecosse.

Mais, encore plus que pour la production d’électricité à partir de la chaleur de la Terre, les Islandais utilisent sous forme directe cette énergie géothermique. Les habitants utilisent depuis des siècles les sources chaudes pour se baigner, et à notre époque moderne, ils disposent de serres et de fermes piscicoles chauffées à l’électricité. Statistique la plus impressionnante, la géothermie est utilisée pour le chauffage de 90% des logements ; près de 80 autres pays utilisent aussi l’énergie géothermique sous forme directe.

Dans l’Océan Pacifique, les Philippines exploitent avantageusement leurs ressources géothermiques. Numéro 2 mondial avec 1 900 mégawatts de capacité installée, le pays tire 17 % de sa production électrique de la géothermie. Il prévoit d’atteindre une capacité de 2 550 mégawatts dans les 4 prochaines années.

Au niveau mondial, c’est cependant l’Indonésie qui a les objectifs les plus ambitieux en matière d’énergie géothermique. Elle est aujourd’hui numéro 3 en terme de capacité installée, avec près de 1 200 mégawatts. La plupart de ses centrales sont opérées par Pertafina Geothermal Energy, une filiale de la compagnie gazière et pétrolière publique. Le gouvernement cherche à réduire sa dépendance aux combustibles fossiles et à accroitre sa sécurité énergétique, et il prévoit de plus que tripler ses installations géothermiques d’ici 2015. L’Indonésie souhaite atteindre en 2025 une capacité de production géothermique de 12 000 mégawatts, permettant de couvrir plus de 70 % de ses besoins actuels en électricité. Cette quasi-sortie du charbon et du pétrole pour le secteur de l’énergie ne reposerait que sur l’exploitation de 2/5èmes des ressources géothermiques du pays.

Le Japon est un autre pays disposant d’énormes ressources géothermiques, mais jusqu’à maintenant seule une petite part (540 mégawatts) est exploitée. En n’utilisant que des technologies conventionnelles, ses ressources potentielles permettraient de couvrir la moitié de la demande actuelle en électricité. Avec la promesse récente du gouvernement de mettre l’accent sur les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique plutôt que sur l’énergie nucléaire, le pays pourrait très vite s’engager à nouveau dans la géothermie.

En Amérique Latine, le Mexique est numéro 4 mondial avec 958 mégawatts de capacité installée. Celle-ci dépasse actuellement l’ensemble des capacités installées de tous les autres pays de la région ; il existe cependant un énorme potentiel à exploiter dans de nombreux autres pays d’Amérique Latine. Un rapport de 1999 de l’association américaine Geothermal Energy Association (GEA) a identifié dans le monde 39 pays (représentant au total aujourd’hui 800 millions de personnes), dont la production électrique pourrait être entièrement assurée par leurs ressources géothermiques. Neuf de ces pays, dont le Costa Rica, l’Equateur, le Salvador et le Pérou, se situent en Amérique Centrale ou du Sud. Au Salvador (6 millions d’habitants), 26 % de l’électricité produite est d’origine géothermique ; Au Costa Rica (5 millions d’habitants), ce ratio est de 13 %.

Treize pays identifiés dans le rapport GEA se situent en Afrique de l’est, dont beaucoup se trouvent dans la Grande Vallée du Rift, active sur le plan tectonique et volcanique, s’étirant de l’Eritrée au nord au Mozambique au sud. Seule l’Ethiopie (avec 7 mégawatts) et le Kenya (avec plus de 200 mégawatts) ont commencé à exploiter leur potentiel géothermique. Mais d’autres pays comme le Rwanda et l’Ouganda, poursuivent activement le développement de cette énergie.

Le Kenya a débuté son exploration géothermique dans les années 1960, et obtient environ 20 pour cent de son électricité de la géothermie. S’il atteint ses objectifs ambitieux de 2 300 mégawatts d’ici 2020 et 5 000 mégawatts d’ici 2030, le Kenya pourrait en quelques années répondre à tous ses besoins en électricité avec l’énergie géothermique et commencer à exporter le surplus.

Au delà de l’explosion du développement des ressources conventionnelles, l’apparition de la technologie des systèmes géothermiques évolués (Enhanced Geothermal Systems - EGS) promet de changer fondamentalement le paysage de la géothermie. L’EGS permet de récupérer l’énergie à des endroits de la croute terrestre qui ont une perméabilité et porosité limitée, en augmentant de façon importante le potentiel estimé. Par exemple, un rapport de l’U.S. Geological Survey de 2008 estime que l’EGS pourrait multiplier le potentiel géothermique américain par 13 par rapport aux ressources conventionnelles disponibles. La technologie EGS est toujours développée, mais si les projets de démonstration en cours en Australie, France, Etats-Unis, et au Royaume-Uni donnent des résultats favorables dans les prochaines années, en augmentant l’intérêt à investir, cela pourrait accélérer la croissance de l’énergie géothermique encore plus que ce que les projections actuelles indiquent.

Un rapport de 2011 de Pike Research projette que même sans nouvelles politiques favorables à la géothermie, l’investissement global dans cette source d’énergie va plus que doubler : de 3 milliards de dollars en 2010 à 6,8 milliards de dollars en 2020. Ajoutez à cela que le nombre de pays utilisant l’énergie géothermique devrait passer de 24 aujourd’hui à 46 en 2015, et semble destinée à une expansion impressionnante. Les possibilités sont pratiquement illimitées : 4,6 million de mégawatts de capacité géothermique mondiale potentielle estimés, en incluant l’EGS et les sources hydrothermales sous l’eau, ce qui pourrait alimenter près de deux fois l’ensemble de l’économie mondiale.


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