previous

89 - PORTER SECOURS AUX ETATS DEFAILLANTS

next
 

Publication du Earth Policy Institute
Extrait de livre
3 février 2010

PORTER SECOURS AUX ETATS DEFAILLANTS

Lester R. Brown, traduit par Marc Zischka, Frédéric Jouffroy et Pierre-Yves Longaretti

Texte original:
www.earthpolicy.org/index.php?/book_bytes/2010/pb4ch07_ss5

L’assistance aux Etats défaillants constitue l’un des principaux défis que la communauté internationale doit relever. La conjonction d’un gouvernement sans réelle capacité d’action, de violences civiles et d’une agitation sociale permanente les pousse droit à l’effondrement. Les programmes d’assistance internationaux habituels sont totalement inadaptés, comme le prouve la dégradation continue de la situation dans des pays comme Haïti, la Somalie et le Yémen. Les enjeux sont des plus importants. (voir l’explication précédente sur les Etats défaillants dans l’update n° 88 - TENSIONS EN HAUSSE, ETATS DEFAILLANTS)

Passé un certain seuil, la progression du nombre d’Etats défaillants va provoquer un effondrement global de notre civilisation. D’une manière ou d’une autre, nous devons renverser cette vague montante de défaillance d’Etats.

La défaillance d’Etats est un processus à sens unique, à de rares exceptions près. Le Liberia et la Colombie figurent parmi ceux qui ont réussi à inverser la tendance.

Le classement annuel des pires Etats défaillants du Foreign Policy mettait le Libéria à la neuvième place en 2005 (en se basant sur des données de 2004), après 14 années de guerre civile qui ont fait 200 000 victimes. Les choses ont commencé à changer en 2005 avec l’accession à la présidence d’Ellen Johnson-Sirleaf, diplômée de l’Ecole Kennedy de gouvernance d’Harvard et qui occupait un poste de responsabilité à la Banque Mondiale. La situation s’est améliorée dans ce pays ravagé par la guerre, grâce à un effort acharné pour éradiquer la corruption, et à la présence de 15 000 soldats de l’ONU dont la mission est de maintenir la paix, de réparer les routes, les écoles et les hôpitaux et d’entraîner la police. En 2009, le Liberia est redescendu à la 34ème place sur la liste des Etats défaillants.

En Colombie, l’amélioration de l’économie (grâce aux cours élevés du café et au gouvernement qui a progressivement gagné en légitimité), a contribué à changer le cours des choses. Classée 15ème en 2005, la Colombie figure désormais en 2009 à la 41ème place du classement du Foreign Policy. Le Liberia et la Colombie ne sont ni l’un ni l’autre tirés d’affaire, mais ils se dirigent tous les deux dans la bonne direction.

Le phénomène des Etats défaillants est relativement nouveau : il exige une réaction nouvelle. Les programmes d’assistance traditionnels basés sur la mise en place de projets ne sont plus suffisants. La défaillance d’Etats est d’origine systémique et réclame donc un traitement systémique.

Le Royaume-Uni et la Norvège ont clairement identifié que la question des Etats défaillants requiert un traitement particulier et ont mis en place des fonds interministériels pour mettre en place un mécanisme de réaction adapté. On ne peut pas encore dire s’ils traitent de façon adéquate le problème de la défaillance systémique d’Etats, mais ils ont au moins reconnu le besoin de concevoir une réponse institutionnelle spécifique. Les efforts des Etats-Unis pour s’occuper des Etats fragiles et défaillants restent par contre dispersés. Plusieurs ministères du gouvernement des Etats-Unis sont impliqués, dont ceux des Affaires étrangères, des Finances et de l’Agriculture, pour n’en citer que quelques uns ; au sein du ministère des Affaires Etrangères, plusieurs bureaux différents s’occupent de ce problème. Cette dispersion a été reconnue par la Commission Hart-Rudman en charge de la Sécurité Nationale pour le 21ème siècle : « Aujourd’hui, la responsabilité pour prévenir et traiter les crises est diluée dans de nombreuses Agences pour le Développement International (AID :U.S. Agency for International Development) et divers bureaux des Affaires Etrangères, entre différents Sous-Secrétariats des Affaires Etrangères et les Administrateurs des AID. Par conséquent, en pratique, personne n’est responsable »

Il faut maintenant créer une nouvelle agence au niveau exécutif : un Secrétariat d’Etat de la Sécurité Globale (Department of Global Security –DGS- ), qui définirait une politique cohérente pour chaque Etat fragile ou défaillant. Cette recommandation a été initialement exposée dans un rapport de la Commission ‘Etats Fragiles et Sécurité Nationale des Etats-Unis’. Elle prend acte du fait que les menaces pour la sécurité proviennent maintenant moins de la puissance militaire que des tendances qui ébranlent les Etats, telles que la croissance rapide des populations, la pauvreté, la détérioration des écosystèmes, et le développement des pénuries d’eau. La nouvelle agence inclurait les AID (faisant désormais partie du Ministère des Affaires Etrangères) et les différents programmes d’assistance extérieure qui dépendent actuellement d’autres ministères; elle assumerait ainsi, au sein du gouvernement, la responsabilité des Etats-Unis pour l’assistance au développement. Le ministère des Affaires Etrangères fournirait un support diplomatique à cette nouvelle agence, contribuant à l’effort global d’inversion du processus de défaillance d’Etats.

Le nouveau Ministère de la Sécurité Globale (DGS) serait financé par transfert de ressources fiscales du Ministère de la Défense. Le budget de la DGS serait en effet un nouveau budget de défense. Il se concentrerait sur les causes principales de défaillance d’Etats en aidant à stabiliser la population, restaurer les écosystèmes, généraliser l’éducation primaire, et renforcer l’autorité de la loi en soutenant les forces de polices, les institutions judiciaires, et si nécessaire, l’armée.

Le DGS aurait à gérer les problèmes de production et de trafic international de drogues. Il ferait des questions d’allègement de dettes et d’accès au marché une partie intégrante de la politique des Etats-Unis. Il serait un lieu de discussion pour coordonner la politique intérieure et étrangère, pour assurer que les décisions politiques intérieures, comme par exemple les subventions à l’exportation de coton ou celles à la conversion de céréales en agro-carburants pour les voitures, ne contribuent pas à la faillite d’autres pays. Ce ministère permettrait aux Etats-Unis d’avoir les moyens d’aider à mener un effort international croissant visant à réduire le nombre d’Etats défaillants. Cette agence encouragerait aussi l’investissement privé dans les Etats défaillants en fournissant des garanties aux prêts destinés à accélérer le développement.

Dans le cadre de cet effort, les Etats-Unis pourraient rajeunir les Peace Corps (organisation américaine de coopération et d’aide aux pays en développement) pour fournir une assistance sous la forme de programmes d’actions de terrain : enseignement dans les écoles, aide à l’organisation de planning familiaux, plantation d’arbres et programmes de micro-crédit. Ce programme impliquerait de jeunes américains, et contribuerait aussi à développer leur sens civique et leur responsabilité sociale.

Du côté des aînés, les Etats-Unis ont un nombre en forte croissance de retraités, très compétents dans des domaines comme la gestion, la comptabilité, le droit, la formation et la médecine et qui seraient ravis de pouvoir se montrer utiles. Leurs talents pourrait être mobilisés dans le cadre d’un corps de Seniors Volontaires. L’énorme réservoir de compétence de gestion dans cette classe d’âge pourrait être exploité pour accroître les compétences qui manquent tant dans les gouvernements des Etats défaillants.

Il y a déjà bien sur de nombreuses organisations bénévoles qui s’appuient sur les talents, l’énergie et l’enthousiasme des jeunes gens et des aînés américains, dont les Peace Corps, Teach For America, et les Senior Corps. Mais les conditions exigent maintenant un effort systématique et plus ambitieux pour exploiter ce réservoir de talents.

Le monde est doucement entré dans une nouvelle ère, où il ne peut y avoir de sécurité nationale sans sécurité globale. Pour intégrer cet état de fait, nous devons restructurer et concentrer nos efforts pour réagir à cette nouvelle réalité.

# # #

Pour avoir plus d’informations sur la manière de traiter les causes à l’origine de la défaillance des Etats, comme la stabilisation de la population et la restauration des écosystèmes de la planète, consultez les extraits suivants du Plan B 4.0 « Instruire chaque personne », « Stabiliser la population », « Vers un futur sain » et « Protéger et Restaurer les forêts ».

Adapté du Chapitre 7 « Eradiquer la pauvreté et stabiliser la population » de l’ouvrage de Lester Brown , Plan B 4.0: Mobiliser pour Sauver la Civilisation (New York: W.W. Norton & Company, 2009), disponible en ligne pour téléchargement gratuit sur :
http://www.earthpolicy.org/index.php?/books/pb4
Des données et sources d’information supplémentaires sont disponibles sur http://www.earthpolicy.org

# # #

Pour s’abonner aux traductions des mises à jour du Plan B de l’Earth Policy Institute:
http://www.ecologik-business.com/inscription-newsleter-lester-brown.html

L’association Alternative Planétaire est le relais en France des idées et du travail de l’Earth Policy Institute:
http://www.alternativeplanetaire.com

Information complémentaire: www.earthpolicy.org

N’hésitez pas à transmettre cette information à des amis, membres de la famille, et collègues !

# # #

pour plus d'informations, contactez:

Contact Presse & Permissions de reproduction:
Reah Janise Kauffman
Tel: + 202 496-9290 x 12
E-mail: rjk (at) earthpolicy.org

Contact Recherche :
Janet Larsen
Tel: + 202 496-9290 x 14
E-mail: jlarsen (at) earthpolicy.org

Earth Policy Institute
1350 Connecticut Ave. NW, Suite 403
Washington, DC 20036
USA
Web: www.earthpolicy.org

 
 
© Ecologik business 2010