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134 - PLANNING INTELLIGENT POUR LA FAMILLE GLOBALE

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Publication du Earth Policy Institute
World on the Edge
Extrait de livre
12 avril 2011

PLANNING INTELLIGENT
POUR LA FAMILLE GLOBALE

 

texte original:
http://www.earth-policy.org/book_bytes/2011/wotech11_ss2

Lester R.Brown , traduit par Marc Zischka et Frédéric Jouffroy

Les Nations Unies ont établi 3 scénarios prévisionnels relatifs à la croissance démographique. La prévision intermédiaire, généralement la plus utilisée, voit la population mondiale atteindre 9,2 milliards de personnes d’ici 2050. Pour la prévision haute, ce chiffre est de 10,5 milliards. Enfin, pour la prévision basse, qui se base sur l’hypothèse que le taux de fécondité mondial passera rapidement sous le seuil de renouvellement des générations, la population culminera à 8 milliards en 2042 avant de décroître. En poursuivant un objectif d’éradication de la pauvreté, de la faim et de l’analphabétisme, nous avons peu d’autres choix que de nous efforcer de suivre cette prévision basse.

Pouvoir ralentir la croissance démographique mondiale implique que toutes les femmes désirant contrôler leur fertilité puissent avoir accès à l’information et aux services de planning familial. Ce n’est malheureusement actuellement pas le cas pour 215 millions de femmes, dont 59 % habitent en Afrique sub-saharienne et dans le sous-continent indien. Ces femmes et leurs familles correspondent en gros au milliard d’habitants les plus pauvres du monde, pour lesquels les grossesses et les naissances non désirées sont un énorme fardeau. L’ancien fonctionnaire J. Joseph Speidel de l’Agency for International Development (agence américaine pour le développement international, AID, ndlt) observe que “ si vous interrogez les anthropologues qui vivent et travaillent avec les pauvres au niveau des communautés villageoises… ils disent souvent que les femmes vivent dans la hantise de leur prochaine grossesse. Elles ne veulent absolument pas tomber enceintes. ”

Le Fonds des Nations Unies pour la population et l’Institut Guttmacher estiment que si l’on pouvait répondre aux besoins de ces 215 millions de femmes pour l’accès aux soins gynécologiques et à une contraception efficace, 53 millions de grossesses non désirées, 24 millions d’avortements provoqués, et 1,6 millions de décès infantiles pourraient être évités chaque année.

La mise en place d’un programme universel de planning familial et de santé génésique et la fourniture de préservatifs supplémentaires pour prévenir le VIH et autres infections sexuellement transmissibles, ne coûterait que 21 milliards de dollars supplémentaires aux pays industrialisés et en développement.

Le passage à des familles de plus petite taille procure de généreux dividendes économiques. Dans le cas du Bangladesh, les analystes ont conclu qu’une dépense du gouvernement de 62 Euros pour prévenir une naissance génère une économie de 615 Euros dans d’autres services sociaux. Pour les pays donateurs, la garantie pour les hommes et les femmes d’un accès généralisé aux services nécessaires apporterait aussi de grands bénéfices sociaux en termes d’éducation et de santé.

Le ralentissement de la croissance démographique apporte ce que les économistes appellent le bonus démographique. Quand la taille des familles diminue rapidement dans un pays, l’augmentation du nombre de jeunes à charge, ceux qui ont besoin d’être élevés et instruits, décline par rapport au nombre d’adultes qui travaillent. Au niveau individuel, la suppression du fardeau financier que sont les grandes familles permet à plus de personnes d’échapper à la pauvreté. Au niveau national, le bonus démographique fait augmenter l’épargne et l’investissement, permet à la productivité de monter en flèche, et accélère la croissance économique.

Le Japon, qui a réduit sa croissance démographique de moitié entre 1951 et 1958, a été l’un des premiers pays à bénéficier du bonus démographique. La Corée du Sud et Taiwan ont suivi, et plus récemment la Chine, la Thaïlande et le Vietnam ont été avantagés par les fortes réductions antérieures de leurs taux de natalité. Cet effet ne dure que quelques décennies, mais il suffit habituellement à lancer un pays dans l’ère moderne. D’ailleurs, à part quelques pays riches en pétrole, aucun pays en voie de développement ne s’est modernisé avec succès sans ralentir sa croissance démographique.

Bien que de nombreux pays en développement en Asie, Afrique et Amérique latine aient réussi à réduire rapidement leur taux de natalité en l’espace d’une génération, après avoir fait baisser leurs taux de mortalité suite aux progrès médicaux et de santé publique, beaucoup d’autres comme l’Afghanistan, l’Éthiopie, l’Irak, le Nigeria, le Pakistan et le Yémen n’ont pas suivi cette voie et ont été pris dans le piège démographique. Les familles nombreuses font peser une charge financière plus lourde sur les parents et les gouvernements ; d’autre part les sociétés ou personnes pauvres ont tendance à avoir des familles plus nombreuses. Ils sont alors “piégés” dans un cycle de pauvreté et de grande fécondité.

Les pays qui ne parviennent pas à réduire la fécondité rapidement font face à un taux de croissance de 3 % par an, soit une multiplication de leur population par 20 sur un siècle. Une croissance démographique si rapide peut facilement limiter les ressources en terres et en eau. Ces grandes “poussées de jeunes ” dépassant la création d’emplois, le nombre croissant de jeunes chômeurs augmente le risque de conflit, et accroît aussi la probabilité de défaillance d’état. En deux mots, les coûts pour la société de ne pas combler le manque de planning familial peuvent dépasser les moyens dont nous disposons.

Une bonne nouvelle est que les gouvernements peuvent cependant très rapidement aider les couples à limiter la taille de leurs familles quand ils décident de le faire. Ma collègue Janet Larsen a écrit qu’en une décennie seulement l’Iran a fait baisser son taux de natalité presque record à l’un des plus faibles des pays en voie de développement.

Quand l’Ayatollah Khomeyni a pris le pouvoir en Iran en 1979, et a lancé la révolution islamique, il a immédiatement démantelé les programmes de planification des naissances bien établis et a préconisé à la place les familles nombreuses. En guerre avec l’Irak entre 1980 et 1988, Khomeyni voulait accroître le nombre de ses soldats combattant pour l’Islam. Son objectif était une armée de 20 millions d’hommes.

En réponse à ses appels, les taux de fertilité ont grimpé, poussant la croissance démographique annuelle de l’Iran à culminer à 4,2 % au début des années 80, un niveau proche du maximum biologique. Quand cette énorme croissance a commencé à devenir un fardeau pour l’économie et l’environnement, les responsables du pays se sont rendus compte que la surpopulation, la dégradation environnementale, et le chômage minaient le futur de l’Iran.

En 1989 le gouvernement a fait volte-face et rétabli son programme de planning familial. En mai 1993, une loi nationale de planification familiale a été promulguée. Les ressources de plusieurs ministères du gouvernement, y compris l’éducation, la culture, et la santé, ont été mobilisées pour encourager les familles plus petites. La télévision et la radio iraniennes ont eu la responsabilité d’attirer l’attention sur les problèmes démographiques et sur la disponibilité des services de planning familial. Quelques 15 000 “ maisons de santé ” et cliniques ont été fondées pour fournir aux populations rurales des services de santé et de planning familial.

Quelques 15 000 “ maisons de santé ” et cliniques ont été fondées pour fournir aux populations rurales des services de santé et de planning familial. L’Iran a présenté une panoplie complète de mesures contraceptives, y compris l’option de la stérilisation masculine, une première pour les pays musulmans. Toutes les formes de contrôle des naissances, y compris des contraceptifs tels que la pilule et la stérilisation, étaient gratuites. L’Iran est même devenu le seul pays imposant aux couples de suivre un cours sur la contraception moderne pour pouvoir recevoir un certificat de publication des bans.

En plus des actions directes de soins médicaux, l’Iran a lancé un effort global pour élever le taux d’alphabétisation des femmes, le faisant bondir de 25 % en 1970 à plus de 70 % en 2000. Le taux de scolarisation des filles est passé de 60 à 90 % . Les femmes et les filles plus éduquées auront probablement moins d’enfants, ce qui fait de leur éducation un investissement judicieux.
Résultat de cette initiative, la taille de la famille en Iran a chuté de sept enfants à moins de trois. De 1987 à 1994, l’Iran a divisé par deux son taux de croissance démographique, un résultat impressionnant.

Une mauvaise nouvelle est qu’en juillet 2010 le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a déclaré impies les programmes de planification familiale du pays et a annoncé une nouvelle politique nataliste. Le gouvernement paierait les couples pour avoir des enfants, en déposant de l’argent sur le compte bancaire de chaque enfant jusqu’à l’âge de 18 ans. L’effet de ce nouveau programme sur la croissance de la population iranienne reste à démontrer.

Néanmoins, l’histoire de l’Iran montre comment la mobilisation généralisée au sein d’une société, intégrant communication vers le grand public, l’accès aux services de planning familial, et l’égalité des sexes dans l’éducation peut accélérer le passage vers des familles plus petites.

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Adapté du chapitre 11, “Eradiquer la pauvreté, stabiliser la démographie, et secourir les Etats défaillants” de World on the Edge: How to Prevent Environmental and Economic Collapse de Lester R. Brown, (New York: WW Norton & Company, 2011), disponible en ligne sur : http://www.earth-policy.org/books/wote

Nous sommes très heureux de vous annoncer la publication en français du dernier livre de Lester Brown, World on the Edge, sous le titre :
Basculement
Comment éviter l’effondrement économique et environnemental ?
La sortie en librairie est prévue pour le 6 octobre prochain. L’équipe d’Alternative Planétaire a contribué à sa traduction. Il sera co-édité par les Editions Souffle Court et Rue de l’Echiquier.

Pour s’abonner aux traductions des mises à jour du Plan B de l’Earth Policy Institute:
http://www.ecologik-business.com/inscription-newsleter-lester-brown.html

L’association Alternative Planétaire est le relais en France des idées et du travail de l’Earth Policy Institute:
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Information complémentaire: www.earthpolicy.org

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