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62 - LE RECHAUFFEMENT SYNONYME DE TEMPETES PLUS DESTRUCTRICES

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Earth Policy Institute
Extrait du Plan B 3.0
Le 9 juin 2009

LE RECHAUFFEMENT SYNONYME DE TEMPETES PLUS DESTRUCTRICES

Lester R. Brown, traduit par Marc Zischka, Frédéric Jouffroy et Pierre-Yves Longaretti

Texte original:
http://www.earthpolicy.org/Books/Seg/PB3ch03_ss6.htm

La hausse de la température globale induit un certain nombre de menaces, dont l'élévation du niveau des mers, et le dessèchement des cultures du à la fréquence accrue des vagues de chaleurs. L’élévation de la température de surface des eaux tropicales fournit aussi plus d’énergie pour alimenter les tempêtes tropicales, provoquant des typhons et ouragans de plus en plus destructeurs. L’effet combiné de la montée des océans, de la puissance accrue des tempêtes et des raz de marée qu’elles déclenchent peut être dévastateur.
Les conséquences potentiellement désastreuses de cette association sont devenues manifestes fin août 2005, quand l'ouragan Katrina a atteint les côtes américaines dans le Golfe du Mexique, près de la Nouvelle Orléans. Katrina a créé un puissant raz de marée dont la déferlante de plus de 8 mètres a totalement détruit plusieurs villes côtières. La Nouvelle Orléans a résisté à la tempête initiale mais a été submergée quand les digues ont cédé. L'eau a tout recouvert dans de nombreuses parties de la ville, obligeant des milliers de personnes à se réfugier sur les toits. Un an après la tempête, en août 2006, les secteurs les plus touchés de la ville restaient encore privés des services essentiels tels que l’eau, l’électricité, l’assainissement, le ramassage d'ordures, ou les télécommunications.

L’alerte anticipée de la tempête et les directives des autorités poussant à évacuer les zones côtières ont fait fuir vers le nord environ 1 million de personnes, en Louisiane ou dans les États voisins du Texas et de l'Arkansas. Plus de 200 000 d’entre elles ne sont pas encore rentrées chez elles, et ne le feront probablement jamais. Ces « expatriés de l'ouragan » forment la première grande vague mondiale de réfugiés climatiques.

Sur le plan financier, Katrina a été l’ouragan le plus désastreux jamais enregistré au niveau mondial ; c’est l’une des huit tempêtes ayant frappé le sud-est des Etats-Unis en 2004 et 2005. Conséquence de ces dégâts sans précédent, les primes d'assurance ont doublé, triplé, voire même décuplé dans certains cas particulièrement critiques. Cette énorme hausse des coûts d'assurance diminue la valeur immobilière des résidences côtières et conduit particuliers et entreprises à quitter les états fortement exposés comme la Floride.

Les ravages causés par Katrina ne constituent pas un incident isolé. A l’automne 1998, l’ouragan Mitch —l’une des plus puissantes tempêtes jamais enregistrées sur l’Atlantique, avec des vents dépassant les 300 kilomètres/heure — s’est abattu sur les côtes d’Amérique Centrale. Les conditions atmosphériques empêchaient la progression normale de cet ouragan vers le Nord, et près de 2 mètres d’eau de pluie se sont déversés en l’espace de quelques jours sur certaines régions du Honduras et du Nicaragua. Sous ce déluge, les habitations, les écoles et les usines se sont effondrées ne laissant que des ruines après le passage de l’ouragan. Les routes et les ponts ont également été détruits. 70% des cultures ont été emportés, ainsi que l’essentiel des sols de surface du Honduras — une terre végétale qui s’était constituée pendant des ères géologiques. Des coulées de boue ont détruit des villages entiers, ensevelissant même quelquefois la population locale.

La tempête a laissé 11.000 morts derrière elle et des milliers de disparus. L’infrastructure de base — routes et ponts au Honduras et au Nicaragua — a largement été détruite. Le président Flores du Honduras a résumé la situation : “ ce qui a été détruit en quelques jours nous a demandé cinquante années d’efforts pour être construit.” Les dégâts engendrés par cette tempête, qui dépassent le PNB annuel des deux pays, ont provoqué un recul de 20 ans dans leur développement économique.

En 2004, le Japon a essuyé dix typhons, un nombre record, engendrant un dommage cumulé évalué à 10 milliards de dollars. Durant la même saison, la Floride a été touchée par quatre des dix plus puissants cyclones de l’histoire des Etats-Unis. Les dommages dus au passage de ces quatre cyclones s’élèvent à 22 milliards de dollars.

Sur cette toile de fond, les compagnies d’assurance et de réassurance ont des difficultés à établir un barème de cotisations couvrant les risques, les données climatiques historiques ne fournissant plus de point de repère fiable pour anticiper le futur. Par exemple, le nombre de désastres liés aux inondations a augmenté au niveau mondial au cours de chacune des quelques dernières décennies, passant de 6 inondations majeures dans les années 50 et 60, à 26 dans les années 90.

Les assureurs sont convaincus que la montée des températures et de l’énergie ainsi disponible pour alimenter le cycle des tempêtes va provoquer dans le futur des pertes beaucoup plus importantes. Ils sont préoccupés par la capacité de leur industrie à demeurer solvable devant un tel assaut de destruction. C’est aussi l’opinion de Moody’s Investors Service, une compagnie qui a revu à la baisse plusieurs fois pendant les six dernières années la fiabilité de plusieurs leaders mondiaux de la réassurance.

Thomas Loser, l’un des experts climatiques de Munich Re (un leader mondial de la réassurance), dit que “ le compte des catastrophes naturelles est maintenant dominé par les désastres climatiques, nombre d’entre eux exceptionnels et extrêmes de par leur importance… Il faut stopper cette expérience dangereuse que l’humanité est en train de mener sur l’atmosphère terrestre.”

Munich Re a publié une liste des catastrophes naturelles ayant entraîné des dommages, d’au moins un milliard de dollars, couverts par les assurances. La première s’est produite en 1983, année où l’ouragan Alicia a touché les Etats-Unis, entraînant des paiements de dommages s’élevant à 1,5 milliard de dollars. Sur les 58 catastrophes entrant dans cette catégorie, 3 étaient des tremblements de terre, incluant le tsunami asiatique dévastateur de 2004; les 55 autres étaient liées au climat — tempêtes, inondations, ou incendies. On a dénombré trois événements de cette nature dans les années 80; 26 dans les années 90 et 26 pour les seules années 2000-2006.

Avant Katrina, les deux événements les plus violents en termes de dommages créés étaient le cyclone Andrew de 1992, qui a détruit 60 000 logements et provoqué plus de 30 milliards de dollars de dommages, et l’inondation du bassin du Yang-Tseu-Kiang en 1998 en Chine, qui a aussi coûté environ 30 milliards de dollars, une somme équivalente à la valeur de la récolte annuelle de riz en Chine. Une partie de l’augmentation des coûts des dommages est due au développement de l’urbanisation et de l’industrie dans les zones côtières et les zones inondables ; mais une autre partie, est due à l’augmentation du nombre des tempêtes et de leur puissance de destruction.

Les régions actuellement les plus vulnérables aux tempêtes les plus dangereuses sont les côtes Atlantiques et celles de la partie américaine du Golfe du Mexique ainsi que la zone des Caraïbes. L’Asie du Sud-Est et du Sud-Ouest, y compris les Philippines, Taiwan, le Japon, la Chine et le Vietnam vont vraisemblablement essuyer l’essentiel des dégâts que créent les puissants ouragans traversant le Pacifique. Dans le Golfe du Bengale, le Bangladesh et la côte ouest de l’Inde sont particulièrement vulnérables.

L’Europe de l’Ouest, où des tempêtes hivernales destructrices apparaissaient traditionnellement au rythme d’une par siècle, a subi la première tempête dépassant le milliard de dollars de dégâts en 1987 — la facture s’est élevée à 3,7 milliards, dont 3,1 couverts par les assurances. Depuis lors, neuf tempêtes d’hiver se sont abattues sur cette région du monde, avec des dommages assurés s’élevant de 1,3 milliards à 5,9 milliards de dollars.

Des événements climatiques de plus en plus extrêmes sont attendus avec le changement climatique. Andrew Dlugolecki, un consultant spécialiste de l’impact du changement climatique sur les institutions financières, relève que les dommages dus aux phénomènes atmosphériques ont augmenté au rythme de 10% par an environ. “Si une telle tendance devait se prolonger indéfiniment” dit-il, “d’ici à 2065, les dommages liés aux tempêtes dépasseraient le produit brut mondial. Bien évidemment l’économie mondiale serait en banqueroute bien avant cela. ” Dans le monde réel, peu de mécanismes de croissance annuelle à 2 chiffres peuvent se poursuivre pendant plusieurs décennies, mais le point principal de Dlugolecki est que le changement climatique peut être destructeur, perturbateur et très coûteux.

Si nous laissons le climat diverger, nous risquons des coûts financiers énormes. Dans un rapport de fin 2006, l'ancien économiste en chef de Banque Mondiale Nicholas Stern a calculé que les coûts à long terme du changement climatique pourraient dépasser 20 pour cent du produit brut mondial (PBM). En comparaison, les coûts à court terme de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour stabiliser le climat, que Stern estime maintenant à près de 2 pour cent du PBM, constituent une réelle aubaine.

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Adapté du chapitre 3, "La montée des températures et du niveau des mers ," du Plan B 3.0: Mobiliser pour sauver la civilisation (New York: W.W. Norton & Company, 2008), disponible en téléchargement gratuit et à l'achat sur: www.earthpolicy.org/Books/PB3/index.htm.

Une présentation résumée du plan B sous forme de diaporama est disponible sur:
http://www.earthpolicy.org/Books/PB3/presentation.htm.(en anglais), et:
http://www.alternativeplanetaire.com/sites/alternativeplanetaire.com/files/docs/resume-PB3.pdf (en français)

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