Publication du Earth Policy Institute
Faits saillants
17 octobre 2012

DES CHIFFRES MARQUANTS TIRÉS DE “FULL PLANET, EMPTY PLATES”

texte original : http://www.earth-policy.org/data_highlights/2012/highlights32

Lester R. Brown, traduit par Marc Zischka et Frédéric Jouffroy

Le dernier livre de Lester R. Brown, Full Planet, Empty Plates : The new Geopolitics of Food Scarcity (Planète Pleine et Assiettes Vides : la Nouvelle Géopolitique de la Pénurie Alimentaire, ndlt) fait référence à plus de 150 ensembles de données. Ces tableaux et graphiques permettent d’appréhender la situation précaire dans laquelle se trouve l'humanité ; le monde sort en effet d’une période d'excédents pour entrer dans une époque de pénuries alimentaires. Voici quelques uns de ces chiffres marquants.

Hausse des prix alimentaires

Entre le début de l’année 2007 et la mi-2008, les prix mondiaux des céréales et du soja ont plus que doublé. L'inflation record des prix alimentaires a provoqué troubles et émeutes de la faim dans quelque 60 pays. La crise économique a ensuite quelque peu fait baisser les prix, mais ils sont cependant restés bien au-dessus de leurs niveaux habituels. A la fin 2010 et début 2011, les prix ont à nouveau battu leurs records, contribuant au déclenchement du Printemps arabe. Les agriculteurs ayant de plus en plus de mal à faire face à la demande croissante en céréales et en soja, de par la hausse mécanique des prix alimentaires, ce qui assure à la plupart des 219 000 nouvelles personnes qui chaque soir s’assoient à la table mondiale, de se retrouver devant une assiette vide.

Lors des précédentes décennies, quand les prix alimentaires flambaient, il était possible de remettre en production des terres en jachère aux Etats-Unis, ou de puiser dans les stocks de céréales. Mais ces deux soupapes de sécurité ont aujourd’hui disparu : il n’ y a plus de jachères aux Etats-Unis, et les réserves mondiales de céréales ont atteint au cours des dix dernières années une moyenne dangereusement basse de 74 jours de consommation.

Au niveau mondial, une récolte record de céréales est maintenant nécessaire chaque année, pour seulement faire face à la hausse de la demande. La population mondiale s’accroît annuellement de près de 80 millions de personnes, et dans le même temps, quelques 3 milliards de personnes dont les revenus augmentent cherchent à "monter dans la chaîne alimentaire", en consommant plus de produits d’élevage, à forte intensité en céréales. En outre, certains pays, (et en particulier les Etats-Unis) ont récemment commencé à transformer d’énormes quantités de céréales en carburant automobile, pour faire rouler les voitures au lieu de nourrir les gens. Aux États-Unis, premier producteur et exportateur mondial de maïs, la quantité de maïs captée par les distilleries d'éthanol est désormais supérieure à celle utilisée pour l'élevage et l'alimentation des volailles.

Malheureusement, plusieurs tendances négatives concourent également à dégrader l'offre, dans l'équation alimentaire. Il s'agit notamment de la baisse des nappes phréatiques provoquée par les pompages excessifs pour l'irrigation, de la perte de sol arable fertile du fait du labourage excessif , et de l’imprévisibilité météorologique croissante due au réchauffement global. Les canicules et sécheresses récentes, comme celles qui ont frappé la Russie en 2010 et les États-Unis en 2012, donnent au monde un aperçu de la façon dont le changement climatique peut anéantir les récoltes.

Un autre facteur limitant la progression céréalière dans le futur est le fait que certains pays les plus avancés sur le plan agricole semblent avoir atteint un "plafond de verre" pour les rendements en céréales. Par exemple, en Europe occidentale, les rendements en blé dans les trois premiers pays producteurs (France, Allemagne et Royaume-Uni), n'augmentent plus depuis plus de 10 ans. Les rendements de riz du Japon stagnent depuis les années 1990, à près de 5 tonnes à l'hectare. En Chine, premier producteur mondial de riz, ces rendements sont maintenant proches de ceux du Japon et pourraient aussi rester à leur niveau.

La ruée mondiale vers les terres

Lorsque les prix des céréales se sont envolés en 2007-2008, certains exportateurs de céréales comme la Russie et le Vietnam ont restreint voire interdit les exportations pour tenter d'empêcher l’emballement des prix alimentaires sur leur marché intérieur. Un certain nombre de pays importateurs de céréales, ne faisant plus confiance au marché international, ont alors cherché à acheter ou louer de grandes étendues de terres à l'étranger pour y produire de la nourriture pour leur propre consommation. Des investisseurs de pays comme la Corée du Sud, l'Arabie Saoudite et l'Inde ont acquis des terres, la plupart en Afrique sub-saharienne. L'Ethiopie et le Soudan, où des millions de personnes dépendent de l'aide alimentaire internationale, ont été les premières cibles de ce mouvement.

 
La ruée mondiale vers les terres ne se limite pas aux investisseurs cherchant à cultiver à l'étranger pour assurer leur sécurité alimentaire. D'autres sont intéressés par la production d'agrocarburants pour répondre aux objectifs de carburants renouvelables fixés par les États-Unis ou l'Union Européenne, ou par la production de cultures industrielles telles que le bois, le caoutchouc, ou le sucre. La terre est également considérée comme une opportunité d'investissement lucratif par des fondations d’universités, des banques d'investissement et des fonds de pension.

Prévenir une panne alimentaire

Le monde est capable de relever les défis posés à l'agriculture, mais ceci ne pourra se faire qu’en sortant du modèle "business-as-usual" pour tout ce qui concerne l'alimentation, la démographie, et l'énergie. Il faudra quelque chose comme une mobilisation de temps de guerre pour pouvoir atteindre les quatre objectifs clefs que sont : la stabilisation du climat, la restauration des écosystèmes de la Terre, la stabilisation de la population et l’éradication de la pauvreté. La bonne nouvelle est que, à bien des égards, ces objectifs se renforcent mutuellement. Ainsi par exemple, la transition vers des familles de plus petite taille contribue à faire sortir les gens de la pauvreté, et vice-versa. L'éducation de tous les enfants, garçons et filles, est nécessaire pour éradiquer la pauvreté et stabiliser la population, et va finalement jouer un rôle pour aider le monde à atteindre une sécurité alimentaire durable.

Cliquez sur ce lien pour consulter la page SlideShare de l'EPI et faire défiler quelques-uns des principaux graphiques. Des chiffres et des tableaux supplémentaires sont affichés avec le premier chapitre de Full Planet, Empty Plates sur le site Web de l'Earth Policy Institute :
http://www.earth-policy.org.

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